Janco fait du Janco
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PS : au passage, petite analyse de
Jean-Marc Jancovici qui nous donne, avec sa vision stratosphérique habituelle, les points marquants de 2010 en terme d'énergie et de climat.
Hélas, hélas, vision pas si stratosphérique que ça, et je dirais même parfois typiquement polytechnicienne au plus mauvais sens du terme, c'est-à-dire assez arrogante et complètement sourde aux évolutions techniques qui ne lui ont pas été enseignées en cours
. J'en veux pour preuve son aveuglement systématique et récurrent sur le photovoltaïque : sous prétexte de dénoncer les subventions abusives à la filière, revues avec raison à la baisse, il raconte n'importe quoi dans
cette interview, et notamment sur les coûts de production.
Déjà, comparer du brut saoudien à du photovoltaïque sur la base du coût par kWh est un non-sens absolu : physique d'abord, parce que le pétrole produit de la chaleur par combustion, et le photovoltaïque de l'électricité, ce qui n'est pas la même chose ! Economique ensuite, parce que
le pétrole saoudien est très, très loin de représenter une moyenne en termes de coûts de production du pétrole mondial... sinon celui-ci ne serait pas à 90 dollars le baril (1 baril = 159 l soit en gros 1500 kWh, ce qui fait 6 cents le kWh ou
4,5 centimes d'euro, soit quand même une très grosse "fraction de centime"
) ! Enfin et surtout, son chiffre de 40 à 50 centimes le kWh pour le photovoltaïque est aberrant avec les techniques actuelles : certes, on peut se permettre d'utiliser des techniques le produisant à ce coût tant qu'on a les subventions idoines, mais c'est justement pour cela qu'elles sont abusives et retardent l'émergence des nouvelles filières à bas coût
!
Son raisonnement est donc particulièrement absurde puisque se basant sur les chiffres de la filière historique qui profite abusivement des subventions et pas sur ceux de celle, naissante, qui détermine l'avenir : le coût du photovoltaïque
actuel,
hors subventions, tel que par exemple celui installé récemment dans les Landes sur
la centrale du Gabardan, est inférieur à
4 € le watt crête tout compris (au niveau des modules, c'est bien moins : on peut même dire que l'industriel s'octroie là encore des marges confortables...). Or dans cette région (pas optimale par rapport à bien d'autres comme le sud de l'Espagne), on arrive déjà à
1100 kWh annuels par kW crête sur capteur fixe. Ou encore 1,1 kWh annuel par watt crête, ce qui fait sur 20 ans 22 kWh. Donc un coût de
18 centimes le kWh en supposant que la production s'arrête dans 20 ans... à comparer avec les 4,5 centimes du pétrole actuel pour un kWh...
thermique ! Qui remonte donc à
18 centimes (tiens tiens...) si on fait la conversion chaleur -> électricité avec un rendement de 25%, en ne comptant pas les coûts du moteur thermique et de la machine électrique utilisés.
Euh... il est passé où, ton facteur 100, M. Jancovici ? T'aurais pas deux zéros en trop par hasard ??
Ajoutons que ses arguments sur l'intermittence et sur l'énergie grise nécessaire à la fabrication des panneaux sont tout aussi minables. L'intermittence ne pose par définition par de problème tant qu'on n'attaque pas la production de base (et on en est très loin comme il le dit lui-même !) et que ça reste prévisible (or le PV l'est, contrairement à l'éolien) ; de plus le PV a l'avantage de produire le plus souvent en période de pointe (eh oui, on consomme
plus d'électricité la journée que la nuit, sauf en hiver où le pic se situe en début de soirée... grâce aux polytechniciens d'EDF qui ont massivement poussé à l'équipement en chauffage électrique dans des logements mal isolés
). Quant à l'énergie grise, il est bizarrement très vague sur la quantité nécessaire à la fabrication d'un panneau (à moins que "beaucoup" soit une nouvelle unité ?) ; sans doute parce qu'il sait très bien qu'un panneau, à moins d'être mis à l'ombre et orienté vers le nord,
produira au long de sa vie beaucoup plus d'énergie qu'il n'en a nécessité pour sa fabrication, et que c'est la seule chose qui compte...
Jancovici avait déjà "démontré" qu'il valait mieux prendre le bateau que l'avion d'un point de vue énergétique pour aller aux USA (alors que c'est l'inverse) ; il finira peut-être par se rendre compte un jour que ses raisonnements sur le PV commencent à sentir le poisson pas frais...
Ceux qui veulent avoir des analyses un peu plus à jour que les siennes sur les coûts de la filière PV peuvent par exemple consulter
ce document (en anglais, désolé).
Et pour ceux qui penseraient que les énergies fossiles en général sont "bon marché", je conseille
ce petit reportage de CBS sur le coût que représenterait la séquestration du CO2 pour les centrales à charbon américaines...
L'
Agence Internationale de l'Energie a aussi
un site dédié au PV où vous trouverez des tas d'infos intéressantes, comme
ce document (en anglais) analysant l'évolution probable de la filière dans les décennies qui viennent, avec les différents seuils de compétitivité à atteindre, sur des arguments rationnels et pas des slogans à deux balles qui ont pour unique mérite de bien se vendre à la radio.