un peu beaucoup de lecture
Un papier plein de bon sens sur le sujet du redémarrage.
Bon pour ceux qui rêvent du monde d'après on est pas trop dans le thème Bigsmile
Pourquoi il faut dire non au déconfinement réversible
La moitié de l'humanité attendait,confinée,-grâce au confinement- l'équivalent de la peste noire. Cinq mois après, avec moins de 300.000 morts dans le monde, nous sommes-grâce au confinement- dans la fourchette basse d'une grippe classique écrit Edouard Tétreau. Cessons pour autant de brandir la menace d'un « reconfinement », qui paralyse l'économie. Testons, au contraire, des idées neuves, pour la relancer.
« Nothing to fear but fear itself. » Alors que pleuvent les métaphores guerrières et les références à Churchill et à de Gaulle, la citation de Roosevelt lors de son discours d'inauguration, le 4 mars 1933, paraît plus appropriée pour la période que nous vivons. D'abord, parce que nous sommes moins en guerre qu'au début d'une crise économique et sociale majeure, potentiellement similaire à la Grande Dépression de 1929. Ensuite, parce qu'un discours dominant, en France comme dans le reste du monde, a fait de la peur le premier moteur de nos actions. La moitié de l'humanité attendait, confinée, l'équivalent de la peste noire. Cinq mois après, avec moins de 300.000 morts dans le monde, nous sommes dans la fourchette basse d'une grippe classique.
Ces excellents résultats, sans aucun doute liés au confinement, aux masques, gestes barrière, etc., doivent nous inciter à passer d'une logique de peur infantilisante et contagieuse, à une dynamique adulte de confiance partagée.
Vitesse et pragmatisme
Que ferait Roosevelt aujourd'hui ? D'abord, il ne perdrait pas de temps à multiplier les arguties ou à inquiéter la population. La vitesse et le pragmatisme sont ici décisifs. Agir sans faire machine arrière. Ainsi, l'idée même d'un déconfinement réversible, paralysante pour tous les acteurs de la vie économique et sociale, est à rejeter avec force. Il faut avancer, et faire évoluer le dispositif de communication. Est-il raisonnable de conserver un bulletin nécrologique quotidien surmédiatisé ? 263 morts le 11 mai, c'est un sixième du nombre moyen de morts quotidiens en France. Un gouvernement rooseveltien s'attellerait davantage à communiquer quotidiennement sur le nombre d'écoles, de cafés, d'hôtels, de restaurants, de commerces, d'usines qui rouvrent - et à ériger en exemple ceux qui le font. Au nom de quel curieux masochisme voudrait-on attendre juin ou juillet pour ces ouvertures , quand tous nos voisins se remettent en marche ? « Vivre avec le virus », puisque tel est le mot d'ordre, cela veut dire prendre le risque qu'il reprenne sporadiquement, ici et là. Ne pas prendre ce risque, c'est condamner le pays à l'effondrement.
Idées neuves
Au-delà de l'optimisme et de l'action, ce qui caractérise Roosevelt de 1933 à 1941, c'est de tester des idées neuves (sécurité sociale, New Deal, plan d'infrastructures, etc.), tenter, sans relâche, et sans avoir peur d'échouer. Sans attendre un grand plan, très nécessaire, mais très incertain - celui qui se discute actuellement au niveau de l'Europe - plusieurs idées concrètes, et immédiatement activables, circulent depuis un mois entre Matignon, l'Elysée et Bercy. Portées autant par des dirigeants syndicaux que des patrons de TPE, ETI et très grands groupes, ces « quick wins » sont des petites pierres qui peuvent inverser la spirale de mort économique actuellement à l'oeuvre. Citons entre autres :
- Des chèques solidaires pour l'économie présentielle (cafés, hôtels, restaurants, salles de spectacles, cinémas), sur le modèle des allocations de rentrée scolaire, permettront à la fois de gratifier le travail des acteurs les plus en première ligne de la crise - en particulier les agriculteurs, manutentionnaires, policiers, militaires, caissières, etc. - et de relancer des moteurs essentiels de notre économie, souvent portés par des entrepreneurs indépendants ou des familles, dont c'est le projet de vie essentiel.
- La réouverture, non seulement des églises et leurs cérémonies, mais de tous les commerces le dimanche jusqu'à la fin de l'année 2020, afin de compenser les mois perdus, mais aussi la perte de chiffre d'affaires liée aux conditions du déconfinement.
- Le déblocage automatique de la participation de tous les salariés de France, pour des dépenses et investissements fléchés, à encourager : immobilier ; bicyclette ou voiture neuve électrique ou hybride ; travaux d'aménagement/isolation dans sa maison ; investissement dans l'agriculture biologique ; dans le capital d'entreprises françaises temporairement malmenées par la crise, etc.
- Un crédit d'investissement dans les médias publicitaires et l'événementiel. L'investissement publicitaire dans tous les médias (TV, radio, presse, affichage) est un multiplicateur de PIB (1€ investi = 8 € de croissance, d'après une étude de Deloitte). Un crédit d'impôt limité dans le temps permettrait aux annonceurs de réinvestir ces espaces, contribuant tant à la croissance du pays qu'à sa bonne information dans une époque dangereuse.
- Des amortissements dérogatoires - comptabilisés en charges exceptionnelles - pour tous les investissements environnementaux, numériques et innovants d'une entreprise. Pas la peine d'attendre un plan européen pour que les entreprises françaises investissent davantage dans l'amélioration de l'environnement (recyclage, etc.), l'énergie décarbonée, ou leur souveraineté numérique.
Redonner confiance
Ces propositions, non exhaustives, ont trois caractéristiques : elles sont imparfaites, mais concrètes, et immédiatement activables. Elles peuvent redonner confiance aux acteurs de l'économie, étape par étape. Nous n'attendons pas de l'exécutif qu'il prononce un discours pour l'histoire : il ne ne sera d'aucune utilité pour restaurer la confiance et les emplois. Si nous restons là-dessus, alors les après-mondialistes, ceux qui trouvent formidable ce monde apeuré, sans vie, sans échanges, sans voyages, sans travail et sans richesses, auront gagné. La balle - et les propositions - sont dans le camp de l'exécutif : à lui de les saisir concrètement. Et rapidement.
Edouard Tétreau est associé-gérant de Mediafin