Vision erronée
Peakiste et réchauffiste sont un seul et même catastrophiste, qui se nourrit d'un espoir : la courbe exponentielle !
La droite linéaire, voila l'ennemi.
Que ce soit le pétrole ou le climat ou l'espérance de vie, son obsession paranoïaque le pousse à imaginer systématiquement l'explosion.
A trop vouloir faire du "business as usual", on finit par se voiler la face :
Voici la courbe de croissance du PIB des EU (la consommation d'énergie est directement corrélée au PIB et à son évolution, à la hausse comme à la baisse). Je rassure tout le monde, celle des pays "développés" est peu ou prou équivalente :
Ma question est : elle est où la droite linéaire ?! Cette courbe est plus apparentée à une exponentielle qu'à une droite. Ou alors, on a pas eu les mêmes profs de maths.
De plus, tous les peakistes sérieux s'accordent pour parler de "plateau ondulant", qui est une succession de mini-chocs entre offre et demande.
Si on a pas eu de "gros choc", c'est surtout que les prix élevés agissent comme des régulateurs en détruisant de la demande. Une fois que l'offre redevient plus élevée que la demande, le prix baisse, permettant à de nouveaux acteurs de s'approvisionner en pétrole. Seulement, il y a de moins en moins de monde qui peut revenir car le pétrole disponible reste limité : si on en veut plus, il faut payer plus cher. Mais si on le paye plus cher, cela détruit de la demande. Bref, on y arrivera pas comme ça.
En conséquence, la situation présente est systématiquement ignorée puisque le très proche avenir (selon ses pires prévisions assumées) sera sans commune mesure comparable...
Voici la distance entre ses prévisions et la réalité :
- en 2007, l'annonce du peakoil pour 2010. Attention : pas une crise du pétrole comme d'habitude. Le mot "peak" devrait être traduit par falaise. Quasi du jour au lendemain (c'est pourquoi, le prix actuel n'a aucun sens pour le peakiste), les prix s'envolent et le pétrole disparaît !
Aujourd'hui, 13 novembre 2013. Le prix du gazole a beau baisser de 6cts, le peakiste ne voit que le jour du peak et il se réjouit...
Pourquoi se baser sur le court terme alors que cela ne signifie rien ?
Les fortes hausses et les fortes baisses sont très courtes dans le temps. Mais la tendance est encore et toujours à la hausse. A l'heure actuelle, le Brent se balade toujours au-delà des 100$...
Pour le peak, pour savoir si on l'a bien dépassé, il faut attendre plusieurs années après ce passage présumé. Donc si le peak a lieu en 2015, on ne le saura que vers 2020, quand on se rendra compte que la production depuis 2016 est plus basse que celle de 2015.
De plus, le peak oil du "pétrole conventionnel" a manifestement eu lieu. Ce ne sont pas les peakistes qui le disent, mais
l'AIE, excusez du peu ! Ceci est apparu dans le rapport 2010 pour un pic passé en 2006.
Je précise que ce pic est valable pour le conventionnel. Cela veut dire que l'on fonctionne encore en légère hausse avec le non-conventionnel, le shale oil, le bitumineux, etc... Mais comme les champs pétroliers déclinent (la majorité, y compris le shale oil américain très récent), ça va pas durer...
Quand aux implications de ce jeu de yoyo, vous pouvez en voir les implications dès maintenant : une reprise économique qui se traîne, attendant la prochaine hausse du prix du pétrole qui détruira encore un peu plus de la demande.
Il n'y aura pas de "clash" avec une grosse pénurie de pétrole. A la rigueur des difficultés d'approvisionnement de temps en temps. Mais il y aura un clash social. Car quand on détruit de la demande, ce sont les plus vulnérables qui sont laissés pour compte. Or, les aides sociales permettent de lisser les inégalités. Pas assez de pétrole, pas assez de croissance, pas assez de moyens pour les aides sociales.
Le gros ras-le-bol fiscal vient aussi de là : pas assez de rentrées d'argent pour l'Etat, donc plus d'impôts, donc plus de difficultés pour les entreprises et plus de précarité pour les plus fragiles donc pas assez de croissance et pas assez d'argent pour l'Etat...
Les peakistes ont raison. L'AIE a fini par l'avouer. Mais ce ne sera pas une disparition totale et brutale du pétrole. Ce serait trop simple, car cela voudrait dire qu'on serait tous sur un pied d'égalité, riches comme pauvres.
Non, non, on aura encore du pétrole, de moins en moins. Et moins on aura de pétrole, plus on aura d'instabilités sociales. L'ennui, c'est que c'est ce dernier scénario qui est le plus dangereux.
Pour les plus intéressés,
lire ce billet qui explique le problème entre facture énergétique, croissance et dette.
Et tant que j'y suis,
une excellente analyse, sur le même blog, du dernier rapport de l'AIE, tout chaud d'aujourd'hui !
Quand à cette vision du réchaufisme, elle a déjà été débunkée sur ce même forum, je fais donc l'impasse cette fois-ci.